Escapade matinale...

Je sors de la pouponnière du camp du tonnerre et me faufile dans la forêt, passant à pas feutrés devant un guerrier qui roupiller devant l'entrée.
La brise fraîche du matin m'éclaircit l'esprit, et je commence à gambader entre les arbres, respirant l'air pur et l'odeur des pins à pleins poumons.
Ah ! Que c'est bon d'être libre pense la petite chatonne !

Mon passé refit subitement surface dans mon esprit, et ma bonne humeur s'en alla aussi sec.
Je reprit ma marche d'un pas mesuré. Je m'arrêtai près d'un vieux chêne, m'assis et entreprit de faire ma toilette. Une fois toute propre, je me roulai en boule contre le chêne comme je le faisait contre ma mère et mon frère plus petite, et sombrai dans un sommeil léger.

Je fus réveillée quelques minutes plus tard par des bruits de pas exagérés, comme s'ils étaient fait pour être entendus. Je grondai, pensant que c'était Nuage Tigré qui était venue me chercher pour me disputer. Mais l'odeur qui s'échappait des buissons n'était pas celle de Nuage Tigré, et encore moins celle d'un membre du clan du tonnerre...
Je bondit sur ses pattes, fait le dos rond, hérisse mes poils pour me rendre plus imposante qu'un simple chatonne et crache :

-Qu'est-ce que tu fais sur mon territoire ?!!

Je commençais à m'inquiéter. Quelle idiote je fus de partir sans prévenir personne !
Cette inquiétude disparût presque aussi vite qu'elle était arrivée, laissant place à un courage louche et un sang-froid grandissant, comme si quelqu'un veillait sur moi.

Je vis alors apparaître une chatte, une guerrière probablement. Mais son odeur... Oui, son odeur, ne me rappelait aucun clan, mais quelque chose d'autre... Je l'ai très peu senti dans ma vie. Mais je la reconnaîtrais entre toute. C'est l'odeur du sang. Le sang qui coulait de la fine plaie de mon frère lorsqu'il s'est coupé avec une épine. Le sang qui coulait de la bouche de ma mère lorsqu'elle était subitement morte. Le sang.
Cette chatte semblait pleine d'assurance. Dotée d'une lueur rougeâtre très farouche au fond de ses yeux. Elle était fine, mais on voyait sous son pelage ébène lustrée des muscles qui frémissaient. Malgré la couleur sombre de ses poils, je distingue sans mal l'origine de l'odeur, des filets de sang qui ne lui appartiennent visiblement pas coulent sur sa gueule.

Elle me répond en ricanant d'une voix froide et mesquine :
-Je vais ou je veux, chatonne. Ce n'ai quand même pas toi qui va m'empêcher d'entrer sur ton "territoire"

Je la vis sortir les griffes et ses yeux maintenant d'un rouge éclatant se réduisent à deux fentes.
J'en déduis que ma fin était proche, et renonce à attaquer, sachant que je n'avais aucune chance.
Mon sang-froid ne me quitte pas... C'est étrange.

Contre toute attente, je m'assois sagement et enroule ma queue autour de moi, attendant que mon heure soit venue. Je la fixe avec mon regard impassible.

Ébène ouvris de grand yeux ronds et rigolât franchement. Elle observa un peu plus attentivement le regard de la petite chatonne qui l’observait d'un air calme et déterminé. Elle a compris qu'elle n'avait aucune chance. Soudain elle frémis, il y avait quelque chose d'étrange chez cette petite chatte. Acacia. Pensa ébène en déglutissant, oui cette chatte ressemblais comme deux gouttes d'eau a sa sœur, morte il y a cela des années tuée sauvagement par le clan de l'ombre.
A ces pensées la lueur rouge sang s'alluma plus forte, plus vacillante enveloppant son regard bleuté. Elle secoua la tête et souris cruellement, sa sœur était morte il y a des années de cela, pourtant c'était le même regard, le même pelage tigré brun et un beau regard tendre chocolat. Elle se demandait toujours si elle était heureuse de la vengeance qu'ébène accomplissait en rongeant les clans jusqu’à la moelle...
N'en pouvant plus elle sauta sur la chatonne toutes griffes sorties la plaquant au sol ne pensant plus qu'a la vengeance se répétant encore et encore que c'était de la faute des clans puis elle griffa violemment la chatte laissant le sang perler au bout de ses griffes acérées, elle voulut le faire encore et encore pour faire disparaître cette stupide illusion. Mais elle suspendit son geste haletante, elle devait se ramener a la réalité, Acacia était morte. elle repris son regard dur comme de la pierre et dit d'une voix froide

-Je vais te laisser en vie, pour la simple et bonne raison que tout les matins tu ressentira de la haine contre moi, que tu t'observera défiguré dans les flaques d'eau, que tu ne verra plus que les cicatrices que je t'aurait infligé qui te parcoure... Tu ne pensera qu'a te venger, mon nom est ébène, tache de t'en souvenir...

Elle ouvrit de grand yeux ronds en me voyant m'asseoir et se mit à rigoler, sans se forcer le moins du monde. Etait-elle folle ? Non, elle me paraissait très intelligente et on voyait dans ses yeux qu'elle savait parfaitement ce qu'elle faisait. Tout à coup, elle changea d'expression et je vis de la tristesse dans ses yeux. Même si cela n'a durer d'une fraction de seconde, je mets ma patte à couper qu'elle a bien ressentis de la tristesse.

Mon cœur se mit à battre plus vite lorsque je m’aperçus qu'elle m'était très familière... Vraiment très familière... Mais aucuns moyens de savoir pourquoi. J'eus beau me creuser la cervelle pendant mes dernières secondes de vie, je ne trouve rien qui me l'explique.

Elle grimaça légèrement pendant quelques secondes, comme si elle lutter intérieurement contre quelque chose. Alors, comme pour mettre fin au débat qui se déroulait dans son esprit, elle me sauta dessus et me plaqua au sol. Je continue de l'observer, avec un regard toujours aussi neutre, puis je ferme les yeux.

Je lâche un hurlement lorsque je sens une douleur lancinante qui parcourt toute la moitié gauche de mon corps, allant de l'arrière de mon oreille à la base de ma queue. Je rouvre les yeux et voix la chatte, la patte levée au dessus de moi comme si elle aller recommencer et des gouttes de mon sang perlant sur ses griffes aiguisées. Elle semblait hésitait mais elle ne recommença pas. Elle sauta à côté de moi et me regarda d'un regard dur comme de la pierre, cette fois ci beaucoup plus sure d'elle, me disant d'une voix froide :

-Je vais te laisser en vie, pour la simple et bonne raison que tout les matins tu ressentira de la haine contre moi, que tu t'observera défiguré dans les flaques d'eau, que tu ne verra plus que les cicatrices que je t'aurait infligé qui te parcoure... Tu ne pensera qu'a te venger, mon nom est ébène, tache de t'en souvenir...

J'essaye de bouger mais le moindre geste me rappelle à quelle point la douleur est insupportable.
Je la fixe profondément, et cette fois-ci mon regard est noir et glacial. Je lui réponds de ma voix de chatonne, toujours aussi neutre et contrôlée malgré la situation :
- J'espère au contraire que toi tu souviendras de moi.

Je ferme mes yeux.

Je me fige avec l'impression que mon sang se glace, palpitant dans mes veines au rythme de mon cœur, l'expression de mon visage se décompose cette voix, cette phrase retentissait encore dans mes oreilles comme une sirène stridente ou une alarme .

Oui cette voix, je l'ai si souvent entendus, entendus le premier jour ou j'ai ouvert les yeux sur le lit de paille dans le territoire des chevaux, entendus le matin en me réveillant, entendus quand j'allais chasser, manger, boire, dormir...Acacia. Non, non, non. Ce n'étais pas possible elle lui ressemblait juste, il fallait que j'arrête. Je ne croyais en rien, mon dieu, mon ange déchu, ma reine était morte. C'était ainsi.

Je me retourne et regarde la petite chatte qui à présent a fermé les yeux, et qui attend surement qu'on l'a trouve. Je ne pouvais pas rester ici plus longtemps, la troupe que j'avais croisé n'allait pas tardé a accourir a l'odeur du sang. Je voulais partir, courir m'envoler peut être mais je n'arrivais pas a m'enlever l'image de l'esprit de ma sœur en sang les yeux vitreux tendis qu'elle poussait son dernier souffle. Je fus prise d'un vertige tendis que je secouais violemment la tête et je vacilla un peu.

Je commençais a avancer mais je ne savais plus ou aller. Je n'avais jamais regarder en arrière ne pensant qu'a la vengeance. Avancer, reculer. Que dois je faire Acacia ?

Je sombre dans un sommeil profond.
Je fais un rêve étrange, où je ne suis pas une chatonne mais une femelle plus grande, plus vieille.
Dans ce rêve, je ne suis pas sur le territoire du tonnerre mais à un autre endroit que je n'arrive pas à déterminer... Des visions défilent et se superposent. Dans toutes celles-ci, je peux voir la chatte qui m'a blessée, Ebène. Mais elle ne m'apparaît pas comme dangereuse, bien au contraire... Je crois que nous sommes amie...

Je nous vois roulée en boule l'une contre l'autre... Entrain de nous faire notre toilette...

Tout ça me paraît très étrange, mais aussi très habituel. J'ai envie de me réveiller mais c'est comme si quelqu'un m'obliger à me mettre dans la peau de cette autre chatte.

Je gémit, je me dandine, je m'étire. Rien n'y fait, je ne me réveille pas.
Je suis obligée d'observer la chatte qui m'a lacérée, et je dois en plus supporter d'être toujours à ses côtés.
Ce rêve étrange est entrain de se transformer en cauchemar...

Ébène finit par craquer et se retourna vers la petite chatte, la patrouille n'arriverait pas avant un moment elle avait le temps. Elle la considéra un instant avant de s'approcher discrètement les yeux réduit a deux fentes rouge sang. Elle s'assoit a coter d'elle et l'observe avec attention, sa respiration semblait réguliaire et elle semblait se débattre dans son sommeil.

ébène ne savait pas vraiment ce qu'elle faisait, elle semblait comme dans une sorte de transe, elle s'assit et pencha son visage au dessus du sien, comme si la jeune chatte allait disparaître a tout moment si elle la lâchait du regard, comme une illusion, un rêve ou un désir sculpter dans la glace, brisé par l’égoïsme et l'ardeur.

Elle s'allongea au dessus de la jeune et lécha délicatement et avec délice le sang perlant sur une estafilade au dessus de sa joue, puis une autre et encore une autre, une a une elle épongea la mare écarlate des innombrables plaies, dévorant du regard la jeune chatte qui aurait pu être sa sœur. Oui sa sœur, son ange, sa reine qu'elle voulait tant revoir et pour laquelle elle continue a vivre dans la souffrance et un désir de vengeance indomptable. Elle logea sa tête dans son cou et souffla d'une voix pleine de douleur

-Acacia... Désolé, désolé c'est de ma faute. Oui de ma faute, je ne voulais pas que tu meures...

Elle sentis quelque chose rouler le long de sa joue. Des larmes? Non non non elle c'était juré de ne plus pleurer, jamais.... Pourtant, c'était des larmes qui coulait rapide et glacial le long de ses joues. Quand est ce la dernière fois qu'elle avait pleurée ? Ha oui, quand sa sœur est morte.

Mon rêve cauchemardesque s'estompe peu à peu, et je finis par dormir dans un sommeil noir, sans rêve.
Je me réveille subitement, entendant du bruit tout près de moi. Je n'ouvre pas les yeux, mais sens une présence à côté de moi. Je sens l'odeur du sang, et je devine qui se tient à mes côtés. Ebène était-elle revenue pour m'achever ? Ou pour m'infliger une blessure de plus ? Quitte à choisir, je préfère de loin la première option, car ma plaie est si douloureuse que je n'ose même pas imaginer en avoir une deuxième.

Mais ni l'une ni l'autre n'est visiblement dans son intention. Elle s'allonge à côté de moi et commence à lécher mes plaies, comme le faisait ma mère pour me toiletter. Je sentais son regard pesant sur moi. Une fois qu'elle eut terminer, j'eus bizarrement beaucoup moins mal.
Ebène logea alors sa tête dans mon cou et chuchota d'une voix presque inaudible :
-Acacia... Désolé, désolé c'est de ma faute. Oui de ma faute, je ne voulais pas que tu meures...

Acacia... Ce nom me disait quelque chose. Il m'était très familier. Je sentis des gouttes couler le long de mon cou. Ebène pleurait. J'ouvris les yeux doucement.
Sans vraiment savoir pourquoi, je lui dit d'une voix bienveillante et adulte que je ne me connaissais pas :
-Mais je suis toujours là, et je ne cesse de veiller sur toi.

Je la fixe avec mon regard profond, toujours sans savoir pourquoi j'avais dit ça.