C'est du boulot ! [PV Écorce de Bouleau]

J'ouvris un oeil. Puis un autre. Je cligna mes yeux, un peu endormie. Depuis quelque temps, je faisais encore des cauchemars sur Foudre, Shimy et accessoirement, Pluie d'été. N'allez pas me demander pourquoi, dans mon, ils dansaient ensemble sur un air de musique louche. Bref, glauque.
Plume d'Aigle devait être en patrouille, aussi je me dirigea naturellement vers la tanière des anciens, pour la tâche la plus ingrate du monde : faire la litière de l'ancien hyper grincheux Écorce de Bouleau. Ô malheur ! Il ne manquait plus que les tiques et je pétais un câble. Hum... Je m'avança jusqu'à la tanière des anciens, maudissant au passage tous les membres du Clan des Étoiles et entra sans m'annoncer. L'ancien semblait encore plus ronchon que d'habitude. Je lui jeta un coup d'œil appuyé et lui dit d'une foix faussement polie :
-Bonjour... Je viens changer ta litière.
Je me mis au travail, cherchant de la mousse propre, grinçant des dents, les pattes pleines de mousses. Écorce de Bouleau me suivait de son regard pénétrant. Et, malheureusement, je ne parvenais pas à l'ignorer. Gênée, je me trémoussa.

Changer ma litière ? Écorce de Bouleau fulmina. Depuis quand il a besoin d'aide ? Si jamais elle s'approche, elle s'en souviendra ! Elle paraissait gênée par mon regard. Bien. Peut-être qu'elle va fuir sous la pression. Mais pour le moment, Écorce de Bouleau s'approcha d'elle et, d'un regard menaçant, lui dit :

- Qui t'as chargées de changer ma litière ?


  Celui qui a osé faire ça va le regretter ! Depuis quand les anciens sont chouchoutés ? Normalement, Écorce de Bouleau aurait chassé Nuage Tigrée, mais il réfléchit. Il attendit la réponse de Nuage Tigrée et ensuite il ira toucher deux mots avec le responsable du dérangement. Je ne les laisserais pas me traiter comme un chaton fragile qui a besoin de se faire chouchouter et qui ne sait pas se débrouiller seul !

Ecorce de Bouleau se rapprocha de moi avec un joyeux et, hum... inquiétant air menaçant sur son visage. Je pris sur moi-même pour ne pas le griffer et j'attendis patiemment sa question super agréable, qui ne tarda pas à venir :
-Qui t'as chargées de changer ma litière ?
Avec un feulement discret qu'il n'avait peut-être pas entendu, mais toutefois excédé, je resta. Mais mon échine s'était arrondie, signe que je n'était pas vraiment vraiment contente. Il me fixait toujours de son regard pénétrant. Je le poussa sans un mot et accéda à sa chère litière. Il y cachait des souris ou quoi ? Il semblait vraiment hors de lui. Il me fixait encore. Excédé, je me tourna vers lui et feula d'un ton rageur :
-Ecoute, stupide boule de poils ! C'est un boulot ingrat ! Tu crois vraiment que je viens ici avec le sourire ? Alors maintenant, tu me fous la paix et tu me laisses faire !
Avec un énorme feulement , je me retourna sur sa litière et la regarda : sale, avec une fine couche qui l'épargnais du sol. Quel félin voudrait dormir ici ? Lui peut-être mais Pelage de Mauve me déchirerais les oreilles si je ne faisais pas cette fichue litière. Les griffes sorties, je continua mon travail. Si Ecorce de Bouleau me refaisait une remarque, il se recevait à coup sûr un coup de griffes bien senti.

Comment ce chaton ose lui parler de cette manière, lui qui c'est toujours battu pour son Clan, ne mérite aucun respect ? Il n'avait qu'une envie, se jeter sur cette chatte insolente. Mais il se contrôla. Il s'en alla le temps de se calmer. Il revint dans sa tanière et vit que la chatte n'avait toujours pas terminer son travail.

- Mais tu ne veux pas te dépêcher, à se point là, tous le gibier aura le temps de mourir de vieillesse !

  Il la regarda, et vit ses yeux pétillants de colère. Il resta à sa place et la soutint du regard. Il allait lui montrer à cette apprentie qui mérite le respect. Il n'allait pas se laisser commander par elle. Il sentit chaque poil de son corps se hérisser et il se retint de sortir les griffes. Il s'approcha d'elle et la poussa le plus délicatement possible, mais avec une froideur grandissante à chaque seconde. Mais un autre sentiment commença à s'installer en lui. Non, je ne dois pas avoir ce genre de sentiment ! se dit-il. Il pris sa litière, la secoua puis la reposa au sol. 

- Voila ! lâcha-t-il, tu es contente ? Ton travail est terminé, allez, ouste !

Ecorce de Bouleau me regarda, sembla vouloir me sauter dessus et finalement sortit de la tanière. Bon débarras ! J'aurais peut-être la paix. J'essaya moi aussi de me calmer un peu : c'était pas en criant sur le vieux guerrier que j'allais m'attirer sa sympathie (ce qui était déjà dur en temps normal). Je regarda la pouponnière : Petite Ébène jouait juste devant, une boule de mousse sous sa patte. Elle semblait heureuse, au moins. Tant mieux. J'entendis les pas d'Ecorce de Bouleau se rapprocher. Avec un sursaut de surprise, je replongea mon museau dans un nœud de mousse très résistant. L'ancien me lâcha un :
-Mais tu ne peux pas te dépêcher, à ce point là, tout le gibier aura le temps de mourir de vieillesse !
Nos regards se croisèrent. Comme je faisais le plus gros effort possible pour ne pas lui sauter dessus puis partir, mes yeux devaient avoir un regard pétillant de colère contenue. Il resta à sa place, soutenant mon regard puis il se rapprocha de moi, me poussa doucement mais fermement par des à-coups et prit enfin la litière, la secoua, ruinant totalement mon travail et la reposa. Il me re-regarda et me dit :
-Voilà, tu es contente ? Ton travail est terminé, allez, ouste !
Je cria de rage : et mon boulot, il en faisait quoi ? De la bouillie ! Je me planta devant lui, essaya de coller mon museau au sien (je suis trop petite et lui trop grand) et lui feula au visage :
-Mais oui ! Quand tu choperas le mal vert, tu ne compteras pas sur moi pour aller chercher Pelage de Mauve !

  Ben voyons ! Une apprentie qui ose lui parler ainsi ? Écorce de Bouleau vit rouge. Il ne se laisserait personne lui parler comme ça ! Mais Écorce de Bouleau sentait quelque chose de bon en étant avec cette jeune chatte, comme un ancien sentiment refoulé depuis longtemps au plus profond de son cœur. Un sentiment léger, doux et apaisant. Il ressentait du bonheur, de l'amusement. Soudain, son cœur se serra et repensa à la dernière fois où il fut heureux. Il oublia instantanément sa joie et redevint froid. Il revint à la réalité et regarda l'apprentie. Il n'essaya même pas de lui répondre, las et fatigué après ce souvenir douloureux. Il ne voulait pas ressentir encore ce sentiment qui avait gâché sa vie, tué ses êtres qu'il chérissait le plus au monde et traumatisé son cœur. Mais d'un autre côté, cette apprentie était la seul à lui tenir tête et cela lui plaisait beaucoup. Il était tellement absorbé par ses pensées qu'il en oublia la présence de la chatte.

Je pris un peu peur : il ne répondait plus à ce que je disais. J'y étais sans doute aller un peu fort... Mais qu'est-ce qu'il m'avait énervé ! Il ne s'en prendrait qu'à lui même. Tenant à me faire pardonner et comme il semblait dans ses pensées, je le contourna doucement et sans bruit pour refaire sa litière une bonne fois pour toute. Je ne souhaitais pas m'attirer les foudres du Clan et surtout d'Etoile de Lune. Je fis mon travail le plus silencieusement possible pour ne pas l'avertir de ce que je faisais. Il semblait penser à quelque chose de triste. Je ne chercha pas plus loin. C'était son affaire (bon, un peu la mienne aussi, je criais sur n'importe quoi) et son affaire seulement. Quand j'eus enfin fini (youpi !), je me retourna vers le chat. Il avait retrouvé ses esprit ou pas ? Je lui demanda doucement :
-Houhou, Écorce de Bouleau !
Il remua légèrement. Ah bah oui, il avait retrouvé ses esprits. Je posa ma longue queue sur son épaule. Je suis là... Je la retira à tout vitesse et lui demanda avec mon air renfrogné habituel :
-Dis, t'as fait comment pour qu'on t'accepte ici ? Moi, on... On me rejette. Il n'y a que toi qui ne me feule pas dessus quand je viens.

Cette question surprit tellement Écorce de Bouleau qu'il vacilla pendant un instant. Comment une jeune apprentie avec autant d'énergie à revendre peut se faire rejeter ? Il fixa l'apprentie et tenta de scruter une quelconque émotion telle que la moquerie dans ses yeux mais n'en trouva pas. Il réfléchis quelques instants et lui dit d'un ton le plus calme et compatissant possible :


- Tu sais, ce n'est pas que les gens ne t'acceptent pas, c'est que tu ne t'aperçois pas que tu es précieuse aux yeux des gens qui t'aiment. Moi c'est différent. C'est le temps et le courage qui m'a permis de me sentir accepté. Mais en vrai, cela faisait longtemps que plusieurs personne aimaient être en m'a compagnie.

  Il soupira, en espérant ne pas avoir ennuyer la novice. Il ne lui avait pas tout dit, naturellement. Il y a des secrets trop gros pour les révéler, même plusieurs saison après. Mais le faites de pouvoir parler de manière non forcée avec quelqu'un lui réchauffa le cœur. Je sens que cette journée va être meilleure que les autres. Cela faisait longtemps qu’Écorce de Bouleau ne devenait de bonne humeur. Il s'assit sur sa litière, puis tourna la tête en direction de la femelle qui attendait toujours.
Il la regarda et, de son ton habituellement grincheux lui jeta :

- Bon, tu attends que je te porte par le coup dans la forêt ou quoi ?