Pretty Butterfly reborn in a new Spring | PV Moumouche

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La saison des neiges était déjà bien avancée. Le sol était couvert d'une couche de neige qui crissait sous les pas d'Hymne d'un Printemps. Et les arbres, dénudés, se vêtait d'une fine pellicule de givre qui étincelait comme un millier de diamants sous les rayons du soleil levant. L'astre du jour, par ailleurs, irradiant sa claire lumière sur la forêt, donnait naissance à un paysage à couper le souffle.

Au loin, l'air sentait la fumée, comme si l'on brûlait des arbres morts. Hymne d'un Printemps frémit en songeant que Ceux Qui Marchent Sur Deux Pattes n'étaient pas loin.

La neige, froide, semblait presque agréable sous les coussinets de la guerrière tricolore. Profitant que sa texture cotonneuse ne soit pas dérangeante, elle s'assit lentement sur le sol et entreprit de lustrer son beau pelage immaculé. Et lorsqu'elle eut fini, elle se releva, sous le bruit mélodieux du tintement de la chaîne accrochée à sa patte droite.

Au Clan de l'Ombre, tous avaient écarquillés les yeux en apercevant Hymne d'un Printemps. Non pas qu'ils avaient été instantanément charmés par la femelle, mais plutôt intrigués. Ils n'étaient pas habitués aux artefacts de Ceux Qui Marchent Sur Deux Pattes, et, pour ne rien arranger, la femelle aux yeux violets n'avait pas un physique très commun.

Tous avaient, en vain, tentés d'en savoir plus sur le passé de leur nouvelle sœur. Hymne d'un Printemps ne parlait jamais de son histoire. Pas parce qu'elle était tourmentée par celui-ci. Mais bien parce qu'elle ne voyait pas l'intérêt de ressasser le passé quand on pouvait se tourner vers un lendemain plus radieux.

Mais l'heure était au présent, puisque pour l'heure, elle devait décider de sa journée. Les patrouilles du jour avaient déjà été définies, elle ne pourrait donc pas contribuer au bien commun de ce côté-là. Et, dans son grand malheur, la réserve de gibier était déjà bien garnie, puisque les chasseurs s'étaient levés presque avant le soleil pour remplir le garde-manger.

Encore pis : Hymne d'un Printemps n'avait pas d'apprenti. Bien qu'elle se doutât qu'étant nouvelle venue, il y avait très peu de chance de se voir confier un apprenti de sitôt. Mais cela lui empêchait, une fois de plus, de contribuer au bien du Clan de l'Ombre, qui était désormais sa nouvelle et définitive - du moins elle l'espérait - famille.

La guerrière tricolore poussa un long soupir tandis qu'un guerrier au pelage d'ébène passa près d'elle, la foudroya de son regard bleu froid et grogna :

- Chatte domestique !

Et il passa son chemin sans rien dire de plus, exaspérant Hymne d'un Printemps. Mais au final, elle n'en voulut pas au guerrier noir. Après tout, elle était comme une intruse, étant née ailleurs, dans des conditions plus favorables que tous ces pauvres félins obligés de se battre pour survivre.

Oui, la vie était dure, et difficile... Raison pour laquelle elle se devait d'aider au mieux les siens !

- De quoi le Clan aurait-il besoin, maintenant... ? murmura la chatte tricolore.

Pretty Butterfly reborn in a new Spring | PV Moumouche 651559Textou

Il y a des gens faits pour aimer, d'autres pour être aimé. Lorsque le loup se met à aimer l'agneau, son idéologie commence alors à s'écrouler.

Papillon Moucheté entra dans le camp, la gueule obstruée par le campagnol dodu qu'elle portait. Elle remercia mentalement les Etoiles : c'était son dernier voyage, elle avait déjà ramené toutes ses proies. L'air glacial qui soufflait dans la forêt, inlassablement et sans pitié, influait grandement sur son humeur. La vie suivait son cours, triste, monotone et ennuyeuse. Toute distraction semblait s'être envolée, en même temps que les couleurs du paysages, c'était évident, le gris dominait. L'Hiver était une belle saison, mais la jolie femelle ne serait pas contre le retour de la saison des feuilles nouvelles, autrement dit, le Printemps. Ce qui la gênait le plus, dans les Clans, c'était leur façon de ne pas appeler les choses par leur nom. Peut-être était-ce du à leur ignorance, mais pour Papillon Moucheté, la poésie qui formait le nom des saisons était quelque chose qu'on ne pouvait passer sous silence. Les Bipèdes, aussi. Quoi de plus stupide ? Les appelait on les Petits Félins ? Les Humains avaient aussi, à son avis, le droit d'être appelés comme il se le devait. C'était peut-être un des seuls points où sa Tribu d'origine était plus évoluée que le système des Clans. Mais ici, elle avait découvert un monde civilisé, résidant dans des règles, le Code du Guerrier. Si elle ne comprenait pas vraiment l'utilité de certaines restrictions, elle n'en montrait rien. C'était une autre des choses qu'elle avait appris. Ici, si on exprime ce que l'on ressent, on est mal vu. Alors elle menait une existence parfaite, on ne pouvait rien lui cacher d'extérieur, elle s'était faite fausse, elle n'était pas ce qu'elle semblait être, mais qu'importait ? Seul ceux dont la proximité le permettait savaient que sous l'eau lisse, de remous incessants l'habitaient. Mais pour être proche encore faudrait-il compter pour elle. Cela faisait longtemps qu'elle se faisait une idée de son cœur. Une petite boîte fermée, aux barrières infranchissables. Si trop de personnes venaient s'y faire une place, il exploserait. C'était un peu enfantin, mais cela l'aidait à se tenir à distance des autres. Bien sur, cette boîte aux merveilles avait des failles, quelques chats avaient réussi à s'y infiltrer, et, nouvellement, un sentiment qu'elle avait peu éprouvé dans sa vie, l'amour.

L'amour n'était pas rare, et, peu importe l'énergie que l'on met à le trouver, il ne surgit qu'aux moments les plus inattendus. Elle savait néanmoins le reconnaître, et elle n'avait plus aucuns doutes en ce qui concernait ses sentiments envers Hymne d'un Printemps. Ce qu'elle ignorait, c'était que l'amour pouvait prendre bien des formes, moins passionnel et plus doux, on appelait aussi ce sentiment l'amitié. Alors elle s'était prise d'une étroite affection pour cette chatte domestique. Si elle avait toujours considéré cette catégorie de chats comme faible, elle, au moins, les considérait comme des félins. Mais il suffisait de poser les yeux, seulement, sur la chatte aux yeux violets, croiser son regard doux pour savoir qu'elle était tout sauf faible. Elle portait les marques de ceux qui ont souffert, Papillon Moucheté était bien placée pour le savoir, elle qui infligeait si souvent la douleur, et pourtant ne semblait pas en vouloir à la vie, ouverte à de nouvelles horizons, et peut-être même.. Heureuse. Elle l'intriguait, l'attirait, lui rendait le sourire. Elle pourrait passer des nuits entières à lui parler de tout, de rien, ou, après réflexions, à se taire tout simplement. Elle était un peu son rayon de soleil, elle l'admirait, elle qui détestait tant tout ce qui pouvait rendre d'autres heureux. La gentillesse lui hérissait les poils, et pourtant elle adorait la façon dont Hymne d'un Printemps cherchait constamment à se rendre utile, comme si elle n'avait pas sa place ici. C'était le cas, mais elles étaient deux.

Tout sourire, Papillon Moucheté s'approcha de la chatte tricolore, tout en pestant sur ce comportement qui lui correspondait si peu.

-Le temps est vraiment horrible, n'est ce pas ? Magnifique, mais tellement froid.. Pourrais-tu m'accompagner ? J'ai absolument besoin de toi pour choisir mon repas ! Allez, viens,fit-elle avec un amusement non dissimulé.

S'il fallait des raisons pour obtenir sa présence, elle pourrait largement trouver assez d'excuses pour passer sa journée avec elle. Le clan n'avait pas besoin d'elles pour le moment, et en son cas, elle avait déjà beaucoup fait.

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Lentement, une forme se découpa à travers la neige immaculée. Et un pelage isabelle immergea de ce qui semblait être le vide dans cet univers blanc et froid. Telle une apparition divine, elle avança, avec l'assurance de la fière guerrière qu'elle était. Un instant, dans ses yeux dorés, elle vit danser une flamme qui ne lui était pas étrangère.

- Pluie de Feu, murmura la chatte tricolore, le souffle coupé.

Pourtant, lorsque la guerrière s'approcha, son illusion se brisa instantanément. Ce n'était pas Pluie de Feu. Non, c'était une autre femelle se son Clan, nommée Papillon Moucheté. Hymne d'un Printemps avait déjà parlé quelques fois avec elle. Elle l'aimait bien, mais le seul sentiment qu'elle lui inspirait était la douleur. On racontait que la chatte isabelle aimait faire souffrir ceux qui s'approchaient trop près d'elle. Cette aura malsaine, la chatte tricolore l'avait sentie. Presque autant que lorsqu'un furieux mâle brun avait réduit en pièces une certaine chatte blanche.

- Le temps est vraiment horrible, n'est ce pas ? dit Papillon Moucheté. Magnifique, mais tellement froid.. Pourrais-tu m'accompagner ? J'ai absolument besoin de toi pour choisir mon repas ! Allez, viens !

Hymne d'un Printemps nota un amusement très perceptible dans la voix de son interlocutrice. Sur le coup, elle ne sut qu'en penser, mais vu que la voix de la chatte isabelle ne vibrait pas sur le ton de la moquerie, elle sut qu'elle n'avait pas été offensée.

Du coup, elle se détendit et soupira. De toute façon, elle n'avait rien à faire. Alors, les deux femelles se dirigèrent ensemble vers le tas de gibier, bien garni, pour "choisir le repas" de Papillon Moucheté.

- Pourquoi pas ce rat, là ? proposa gentiment la guerrière tricolore. Il m'a l'air plutôt gras, pour la saison ? On se demande où elles vont chercher à manger, ces bêtes-là. Que j'aimerais que les guerriers de l'Ombre soit aussi gros que ce rat par cette saison funeste...

Et elle sourit amicalement à sa comparse avant de déposer la proie devant elle. Hymne d'un Printemps se sentait, d'une part, très proche de Papillon Moucheté, bien que leur relation fut "distante". En effet, si les deux femelles s'appréciaient, pour la guerrière tricolore, cela n'allait pas plus loin. Mais elle ne s'en plaignait pas. Papillon Moucheté ne désirait pas être son amie, elle comprenait. De toute façon, la chatte isabelle n'était pas très réputée pour sa panoplie d'amis...

Mais de l'autre côté, elles étaient pareilles : deux chattes ayant sans doute perdu un foyer qui leur était cher et qui subsistaient du mieux qu'elles pouvaient aux côtés de félins dont elle ne méritaient pas la compagnie. Elle étaient des intruses, des non-natives du Clan de l'Ombre. Pour ne pas subir les insultes et la haine des siens, Papillon Moucheté avait choisi la voie de la solitude. Plus douce et docile, Hymne d'un Printemps, elle, avait préféré la gentillesse et l'entraide pour prouver sa valeur.

En bref, si les deux chattes avaient un caractère complètement opposé, elle partageaient une histoire presque similaire qui les rapprochaient beaucoup, par conséquent. Et même si Papillon Moucheté était très froide, l'ancienne membre de la Fraternité ne parvenait pas à lui en vouloir, et, au contraire, cette éternelle froideur éveillait chez elle une sympathie infinie.

- Tu as raison, la saison est mauvaise, dit elle d'une voix lointaine.

Puis des bribes de magnifiques paroles revirent à sa mémoire.

- Fredonne-moi un Hymne, pour que le Printemps arrive. Et dans mon cœur résonne une Berceuse magnifique, pour que l'Hiver disparaisse à jamais, fredonna Hymne d'un Printemps.

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